L’école Baril

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L’école Baril est barricadée depuis 2011 et ce n’est pas demain la veille que le personnel et les élèves y retourneront et si la Commission scolaire de Montréal et à peu près tout le monde à son mot à dire, probablement que personne n’y retournera. Comme tellement d’autres infrastructures publiques au cours de ces dernières années, un rapport de mai 2000, quoique non urgent, sonnait déjà une alarme à ce sujet. Onze ans plus tard, l’École Baril est un autre exemple de victime d’une génération entière de gestionnaires ne mettant aucune importance dans l’entretien. La CSDM a approuvée une enveloppe de 19 millions de dollars pour la démolition et la reconstruction d’un nouvel édifice prévue pour une ouverture en 2016. mais voilà qu’aujourd’hui même, le Conseil du Patrimoine de Montréal a déposé son rapport et suggère grandement de rénover ce bâtiment qui selon eux, a une énorme valeur patrimoniale.

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Mais voilà, les experts n’ont pas tous la même histoire, pendant que certains disent qu’il serait impossible de complètement éradiquer les traces de moisissure dans les murs du bâtiment, d’autres affirment que puisque l’école a complètement été vidée de son intérieur et qu’il ne reste qu’une coquille vide, il serait possible, plus rapidement et à moindre coût, d’effectuer les rénovations nécessaires pour conserver cette école datant de 1910. Le seul fait que le bâtiment est centenaire n’est pas la seule raison pour sa grande valeur patrimoniale, mais également, sa construction de très haute qualité et son histoire importante liée au quartier d’Hochelaga. Certains traits expliquant l’importance architecturale de l’école sont ses sources tirées dans le style Beaux-Arts qui puise dans les formes du classicisme académique son inspiration, l’originalité du rapport de couleur entre pierre, brique et autres éléments et la chaleur des tons jaunes et orangés de la brique choisie. Vue sur la Rue Adam, sa composition se distingue grâce aux jeux de retraits successifs des façades, un aspect architectural unique dans les bâtiments considérés importants de la CSDM.

C’est en janvier 1910 pour décongestionner l’école Adélard-Langevin que la municipalité scolaire d’Hochelaga mandate M. Georges Edmond Baril et Wilfrid Desjardins à faire l’acquisition de terrains pour construire une nouvelle école. La mort de Raymond Préfontaine, ancien Maire d’Hochelaga et de Montréal en 1898 laisse plusieurs terrains lui appartenant à ses fils qui les vendent pour la construction de l’école à un coût de 2 400$ pour les quatre lots. L’achat de lots se continue jusqu’en 1921, plusieurs années après l’ouverture de l’école pour effectuer différents agrandissements. Certains de ces acquisitions se font dans la controverse par exemple, dans la vague d’achat originale de 1910, un dénommé Jean Zappa vend un lot voisin de ceux achetés à la succession Préfontaine pour plus de 3 300$, plus de cinq fois le prix.

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Les architectes retenues sont Alphone Venne et Dalbé Viau, qui signent la création de plusieurs écoles dans la région Montréalaise, mais également des endroits importants comme l’Oratoire St-Joseph, le Collège Bois-de-Boulogne et l’Hôpital du Sacré-Coeur. L’école est ensuite agrandie dans les années 30 avec deux ailes de part et d’autre de l’immeuble central et finalement, un gymnase est construit à la fin des années 80. L’odonyme d’École Baril vient en honneur au Président de la commission scolaire d’Hochelaga, le Docteur Georges-Edmond Baril. Les travaux débutent en mai 1910 et se terminent en avril 1911. Je vous ferais remarquer que ce bâtiment qui tient encore debout a été construit en moins d’un an. L’école ouvre ses portes en septembre 1911 et l’école accueille 706 élèves de niveau primaire ne dépassant pas la 4e année.

Cours d'Éducation Physique, circa 1920
Cours d’Éducation Physique, circa 1920

Le Docteur Baril né en 1859 en Mauricie s’installe dans Hochelaga en 1883 et pratique la médecine dans son cabinet privé et à l’Hôtel-Dieu. Le docteur exerce sa profession dans un des quartiers les plus pauvres et populeuse de Montréal, il apportait aux familles des soins médicaux, mais aussi un réconfort moral qui lui a valu son titre de Médecin des pauvres. Très grand catholique et fervent défenseur du français au Québec mais surtout en Ontario où les Franco-ontariens sont simplement convertis à l’anglais par la fermeture des écoles bilingues. Son fils préside l’association nationale catholique fondée par l’Abbé Lionel-Groulx. Intéressé par le monde scolaire de son quartier, il y sera commissaire d’école pendant 29 ans. « Le docteur des pauvres », décède chez lui en 1913.

En conclusion, garder ou ne pas garder, il est évident que le bâtiment est d’une valeur patrimoniale importante et une rénovation complète serait beaucoup moins dispendieuse. Mais, il est difficile d’en vouloir à ceux qui y seront jour après jour d’en avoir un peu peur. Pour l’éducation des enfants d’un quartier qui en a grandement besoin, une nouvelle école à la fine pointe de la technologie serait sûrement la bienvenue. Pendant que le débat fait rage, ce sont les élèves et les enseignants qui angoissent sur leur futur établissement scolaire. La procrastination n’est-elle pas un des passe-temps favoris de nos décideurs ?

NDLR: La plupart de l’information historique de ce billet est tiré de ce document (PDF) et l’information architectural de ce document datant de février 2013 (PDF)

Classe de première année, 1952
Classe de première année, 1952

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Martin Bérubé Écrit par :

Amoureux de Montréal, fasciné par l'histoire de la ville, son urbanisme et sa toponymie, ni historien ni spécialiste du sujet, Martin n'était même pas né à l'époque de 99% des sujets discutés de ce site. Il aime trouver des réponses aux questions qui sont posées. Les billets que vous lisez ne sont que les résultats de la quête vers des réponses et le besoin de partager.